Jude Welton dit dans Les clés de la peinture :

« Par la beauté de leurs réalisations, par leur renommée, les artistes contribuent ainsi à faire connaître à tout un chacun des formes originales et inattendues, la pureté de leurs lignes, la perfection de leur équilibre, l'étonnante diversité de ces objets mathématiques, incarnés dans la pierre éclatante, dans le métal étincelant, ou révélés par le dessin, par le jeu des couleurs, gaies, vives et chatoyantes. L'art mathématique contribue ainsi à renouveler l'art plastique. Et nul doute qu'au fil du temps plus nombreux seront les artistes à trouver une part de leur inspiration auprès des œuvres mathématiques ». Pour reprendre les derniers propos de Jude Welton, les mathématiques et la science m’ont toujours attirée. J’ai toujours trouvé qu’il y avait une certaine beauté et une harmonie particulière dans la géométrie, et je m’intéresse plus particulièrement à celle observable dans la nature. Je trouve que bien qu’en mathématique, la sphère et le triangle sont des figures essentielles, une chose aussi abstraite qu’un nuage ou les ramifications d’un arbre sont également des formes à observer et considérer. Autour de nous, tout obéit à des formes et des règles bien précises et si on observe bien, on peut trouver des figures complexes et magnifiques sur les branches d’un pissenlit ou dans les filaments des anémones de mer. Cette notion d’harmonie, je la traduis premièrement dans mes créations en utilisant des techniques de composition comme le nombre d’or ou la règle des trois tiers. En effet, je cherche à plonger le spectateur dans un certain état de bien-être et de contemplation, et ces règles mathématiques favorisent ce côté immersif. J’aime ainsi reprendre des figures de la géométrie sacrée, qui peuvent être définies comme un ensemble de proportions, de manipulations géométriques et de dimensions, telles qu’elles ont pu être observées dans la nature.

J’utilise également beaucoup de figures symboliques, et surtout le cercle (très présent dans mon travail plastique), car c’est une forme subtile aux multiples facettes. Celui-ci représente unité, complétude, illumination, cycle de vie et de renaissance. Le cercle est le symbole le plus répandu, et d'une signification universelle. Il est l'une des premières formes tracées par les humains. Il n'a ni commencement ni fin, ce qui en fait un symbole universel d'éternité, de perfection, de divinité, d'infini. Il représente ainsi les cycles du monde naturel. L’art du mandala qui signifie d’ailleurs « cercle » en sanskrit découle de cette forme somptueuse. Pour différentes traditions du monde, les mandalas sont d’ailleurs des dessins mystiques, symboles d'énergie cosmique. Supports de méditation et d'harmonisation.

Pour représenter cette notion d’harmonie de formes, je me sers de plus en plus de la symétrie. Avec un jeu de miroirs, que ce soit en photographie ou sur logiciel, j’essaie de donner une autre dimension à mes images, une dimension d’infini, de fractales. Je suis par conséquent captivée par les artistes qui utilisent des procédés de symétrie pour créer, comme l’artiste new-yorkaise Sarah Meyohas avec sa série de photos baptisée Speculations. Dans cette installation, elle a placé deux miroirs l’un en face de l’autre, de sorte que leurs reflets semblent infinis. Pour faire disparaître son propre reflet et celui de l’appareil photo, l’artiste se place derrière un miroir sans tain. Elle peut ainsi capturer l’image qui se « fabrique » entre le miroir sans tain et le vrai miroir.

J’ai beaucoup usé de cette idée de symétrie pour L’Odyssée d’Hagbard, afin d’arrêter le lecteur quelques instants sur les images de l’incroyable voyage d’Habgard, entre la Norvège et le Moyen-Orient. Ce que j’aime dans les jeux de miroirs, c’est toujours cette idée d’harmonie et d’infini qui peut découler de ce processus. De plus, en jouant avec cette symétrie, on aboutit à des motifs étranges, presque irréels, il est possible de transformer complètement l’image d’origine.

Pour appréhender davantage encore cette notion d’infini, de géométrie et de symétrie, je me penche de plus en plus vers la modélisation 3D. Mon travail en trois dimensions fait à partir de logiciels comme Blender, m’aide réellement à travailler des motifs en volumes cette fois-ci, qui reprennent des figures de géométrie sacrée. C’est avec ce dernier que j’aime reprendre notamment le phénomène de fractale.

Pour conclure, la nature est une source d’inspiration pour beaucoup d’artiste car elle est constituée de figues mathématiquement complexes. Personnellement, ce que j’apprécie dans l’observation de celles-ci, c’est qu’elles me permettent, que ce soit en 2D ou avec la modélisation 3D, d’appréhender la géométrie et les mathématiques de manière plus intuitive et moins complexe.